"Ce que je compte faire ?" répéta Alexander en réfléchissant soigneusement aux prochains mots qu'il allait prononcer.
"Rien."
Ouais, il ne comptait rien faire. Que pouvait-il faire de toute façon ? Il ne savait rien de l'être inconnu et, de toute façon, cet être ne semblait pas hostile, sinon il ne serait pas là.
Alors, il ne comptait rien faire avant que son log pose ne soit totalement rechargé et qu'il puisse enfin quitter cette île.
Mais "ne rien faire" ne signifiait pas rester sur le bateau à glander, mais plutôt éviter de provoquer les forces de l'île, au risque que cela se retourne contre eux.
Alors, durant les deux jours restants pour que le log pose se recharge, il comptait encore visiter les différents endroits de l'île de fond en comble.
C'était l'une des rares fois qu'Alexander voyait de la neige, alors il comptait bien en profiter.
"Qu'il en soit ainsi alors," dit Abdul en hochant la tête, satisfait de la réponse d'Alexander. N'ayant aucune réelle information sur l'être inconnu, il n'aurait certainement pas voulu partir à sa recherche si Alexander avait souhaité le poursuivre.
Surtout que cet être lui faisait honnêtement un peu peur. Rien qu'avec le récit d'Alexander, Abdul se rendit compte qu'il faisait partie de ces monstres sillonnant les mers.
"J'espère ne pas le croiser," pensa Abdul sinistrement.
"Elle se réveille," dit soudainement Crocus, qui jusqu'à présent se contentait d'écouter la discussion sans vraiment en faire partie.
Le visage de Delilah commença à se crisper avant qu'elle n'ouvre les yeux petit à petit, prenant garde à ne pas les ouvrir trop vite au risque de s'aveugler.
La lumière s'introduisant dans son champ de vision, elle sentit sa conscience revenir en elle instantanément.
Elle grogna d'une voix inaudible, sa gorge était sèche et ses paroles incompréhensibles.
Crocus se rapprocha alors et essaya d'entendre ce qu'elle voulait dire.
"…er… de… l'eau…"
"De l'eau ! Elle veut de l'eau !" aboya Crocus à Alexander, qui se pressa d'aller chercher de l'eau pour abreuver Delilah.
La relevant légèrement du lit, il la tint par le dos avant de lui faire boire délicatement l'eau, en veillant à ce qu'elle ne s'étouffe pas.
Delilah finit très rapidement l'eau qu'Alexander avait ramenée, mais c'était suffisant au vu de l'expression de Delilah, qui était clairement plus saine qu'avant son réveil.
"Tu vas bien ?" demanda Alexander en souriant. Il essayait de rassurer Delilah en ne posant pas de questions trop brusques comme : "Qu'est-ce qui t'est arrivé ?"
"…Oui ? Enfin, je pense," répondit Delilah, n'étant pas trop sûre de son état. Elle sentait que son corps était en bon état, mais que son esprit était fatigué. Elle ne savait pas comment décrire cela, mais c'était bien ce qu'elle ressentait.
"Qu'est-ce qu'il m'est arrivé ?" demanda-t-elle soudainement à Alexander. C'était la dernière personne avec qui elle était ; elle se souvenait qu'ils voyageaient dans la neige avant qu'il ne s'arrête, et puis c'était tout. Après cela, elle ne se souvenait plus de rien.
En entendant sa question, l'expression d'Alexander, d'Abdul et de Crocus se figea simultanément.
C'était à eux de poser cette question, mais voilà qu'elle la leur posait avant eux.
"Avant ça, peux-tu me dire ce dont tu te souviens avant que tu ne perdes conscience ?" demanda Alexander en jetant un coup d'œil taquin à Abdul et Crocus pendant que Delilah ne le regardait pas.
"Ce dont je me souviens ? Alors…" Delilah décrivit tout ce dont elle se souvenait à Alexander, jusqu'à ce qu'ils s'arrêtent dans leur marche vers Eliott, puis plus rien.
"Je vois," soupira Alexander dramatiquement en secouant les épaules d'un air découragé.
"Qu'est-ce qu'il y a ?" demanda Delilah, inquiète en voyant le comportement suspect et inhabituel d'Alexander. En le voyant comme ça, elle eut soudainement un mauvais pressentiment qu'elle n'arrivait pas à définir.
"Quelque chose de mauvais va se passer," pensa-t-elle en fronçant les sourcils de confusion.
"Eh bien, tu vois, cela va faire sept mois. Sept mois que tu es dans un coma profond, Delilah," déclara Alexander avec le plus grand sérieux, surprenant Abdul et Crocus qui ne s'attendaient pas du tout à ce qu'Alexander commence à taquiner Delilah dès son réveil.
"Hein ?!" Le cerveau de Delilah court-circuita en entendant les propos d'Alexander.
Elle regarda Abdul et Crocus à la recherche d'une contradiction de leur part, mais ils hochèrent simplement la tête mécaniquement, avec des expressions faciales légèrement distordues.
Quelque chose que Delilah aurait remarqué en temps normal, mais à cause de son réveil, son cerveau n'était pas encore à son paroxysme, donc elle ne vit pas ces incohérences.
"Mais comment ?" demanda-t-elle, bouche bée et désespérée. Elle venait tout juste de prendre la mer, et elle avait déjà perdu sept mois à ne rien faire d'autre que dormir.
"Après que tu te sois évanouie, je t'ai directement amenée au navire, et Crocus a essayé tant bien que mal de te réveiller, mais malheureusement, rien ne semblait fonctionner," s'exclama Alexander, de plus en plus excité, bien qu'il le cachât assez bien sous sa façade sérieuse.
"Mais nous n'avons pas abandonné, alors on a cherché les meilleurs des meilleurs médecins de Grand Line, fouillant de fond en comble. Mais malheureusement, toujours rien." Affaissant ses épaules en signe de défaite et de tristesse, Alexander était au sommet de son art. Si Abdul et Crocus n'avaient pas été au courant de sa mascarade, ils l'auraient presque cru.
"Qui l'eût cru," pensa Crocus en voyant jusqu'où Alexander était prêt à aller pour une simple blague.
Il ne savait pas qu'Alexander pouvait être si diabolique même avec ses propres coéquipiers.
Je vais devoir être sur mes garde, pensa crocus.
"Alors, comment me suis-je réveillée ?" demanda Delilah en se mordant les lèvres, les yeux légèrement embués de larmes prêtes à couler d'une seconde à l'autre.
C'est à ce moment-là qu'Alexander se rendit compte qu'il était allé trop loin dans la blague.
Mais il ne pouvait pas abandonner maintenant, alors il ravala sa légère culpabilité et déclara d'un ton imposant :
"Alors, nous avons–"
Mais soudainement, une nouvelle personne entra dans la pièce : c'était Alger.
Voyant Alger, Alexander ressentit soudainement un mauvais pressentiment.
Alors, très discrètement, il lui fit des clins d'œil pour qu'il ne dise rien, mais malheureusement, semblant ne pas comprendre le message, Alger dit d'un ton surpris :
"Hein ? Vous êtes déjà de retour de chez Eliott ?"
Voir Alexander et Delilah ici fut une surprise pour Alger, qui les avait vus partir le matin même.
"Que veux-tu dire par là, Alger ?" demanda Delilah en plissant les yeux, comme pour confirmer quelque chose.
Voyant cela, Alexander sut qu'il avait complètement merdé. Alors, sans perdre de temps, il se leva et courut… du moins, c'est ce qu'il était censé faire.
Mais une poigne de fer le retenait.
C'était Delilah.
Sentant quelque chose de louche, elle attrapa le poignet d'Alexander avant qu'il ne puisse fuir.
Elle n'avait même plus besoin d'entendre ce qu'Alger avait à dire, la réaction d'Alexander avait répondu à toutes ses questions.
Ce salaud s'était bien foutu de sa gueule.
"Qu'est-ce qu'il se passe ici ?" demanda Alger en fronçant les sourcils. Il venait tout juste de sortir de sa cabine pour prendre l'air, mais il trouva Delilah allongée sur le lit de "l'infirmerie" et Alexander lui tenant le dos, alors qu'il n'était pas du tout censé être sur le bateau.
"Quelque chose cloche," pensa Alger.
"Pouvez-vous sortir, s'il vous plaît ?" demanda soudainement Delilah avec un sourire magnifique.
Magnifiquement démoniaque, ouais ! pensa Alexander en sentant une multitude d'intentions malveillantes envers sa personne derrière ce sourire.
Sans perdre de temps, Abdul et Crocus sortirent sans faire d'histoire. Alger, voyant cela, ne risqua pas sa chance et les suivit mécaniquement.
Il ne comprenait pas ce qu'il se passait, mais il sentit qu'il allait lui arriver quelque chose de très mauvais s'il restait ici.
"Je vais te laisser te reposer, d'accord ?" dit Alexander avec un sourire charmant, essayant d'alléger l'atmosphère et de s'échapper. Mais malheureusement pour lui, Delilah ne tomba pas dans le panneau.
Elle resserra encore plus fort sa prise sur son poignet.
Avant de sourire encore plus magnifiquement.
"C'est un beau sourire," pensa Alexander en transe. Enfin, ça l'aurait été si, comme son précédent sourire, il ne cachait pas une telle malveillance.
"Mais je suis foutu."
…
Deux jours s'étaient écoulés très rapidement et, pendant ce temps, Alexander était parti en expédition dans tous les endroits de l'île où il pouvait aller.
"Le log pose devrait être rechargé maintenant," pensa Alexander en prenant le chemin du retour vers le bateau. Il portait un grand sac sur son dos, c'était les vivres pour le prochain voyage, et il était assez pressé et content.
"Je vais enfin pouvoir regoûter à cette cuisine."
Pendant ces deux jours, Alexander n'avait rien mangé… non, plutôt, il n'avait pas mangé la cuisine de Delilah.
À cause de sa blague, Delilah lui avait interdit de manger sa cuisine durant tout le séjour sur cette île. Une punition excessive d'après lui, mais il ne pouvait rien y faire. Il l'avait amplement méritée ; c'était juste le retour du bâton.
Arrivant sur le port, Alexander se dirigea directement vers le bateau tout en observant son environnement.
"Ils ont peur," pensa-t-il avec un sourire en voyant les habitants locaux l'éviter comme la peste.
Durant ces deux derniers jours, un grand nombre de chasseurs de primes étaient venus tenter de leur prendre la tête, mais inévitablement, ils ne trouvèrent que le repos éternel.
"Eux aussi le méritaient, je suppose."
Sautant, comme à son habitude, pour monter sur le bateau, il se dirigea directement vers la salle des commandes et y déposa le sac avant de se tourner vers Alger pour lui demander :
"On y va ?"
Alger regarda le log pose en fronçant les sourcils avant de répondre :
"Je sais pas, il faut que j'aille voir Crocus avant."
Le log pose était complètement rechargé, mais au lieu de pointer vers la prochaine île, il faisait quelque chose de complètement bizarre.
"Est-il cassé ?" pensa Alger en descendant vers les cabines pour y retrouver Crocus.
Lui montrant le log pose, Crocus sourit légèrement avant de dire d'un ton mystérieux :
"Ne t'inquiète pas, suis juste le log pose, et dans trois jours, tu verras la magie de Grand Line."
"La magie de Grand Line ?" répéta Alger dans sa tête en retournant dans la salle des commandes.
"Alors, on y va ?" Il était actuellement 19 h, et Alexander était pressé de partir pour vite mettre fin à sa punition et pouvoir manger le dîner de Delilah.
"Ouais, on y va," répondit Alger, faisant confiance aux dires de Crocus. Il avait plus d'expérience que lui sur Grand Line, et ses conseils n'avaient jusqu'à présent jamais failli.
Et ainsi, Alger regroupa tout le monde et se mit à hisser les voiles.
S'éloignant petit à petit de l'île, ils étaient enfin partis pour un nouveau voyage.
Pendant ce temps, haut dans le ciel, était assis un homme sur ce qui semblait être le palier d'une porte.
C'était Bethel Abraham.
Il observa quelques secondes l'équipage d'Alexander avant de fronçait les sourcil et de se laisser tomber en arrière dans la porte et de disparaître.
Levant la tête vers le ciel, Alexander ressentit quelque chose de familier.
Mais voyant qu'il n'y avait rien, il perdit tout intérêt.
"Ça devait être un oiseau balèze."